mardi 8 septembre 2020

Dévoilement d'Apothéose

Apothéose, 2018, acrylique sur toile, 600/200 cm
Apothéose, 2018, acrylics on canvas, 600/200 cm


 
En 2014, Albrecht von Stetten a demandé à me rencontrer en personne pour me proposer de faire mon «Chef d’œuvre». On s’est rencontrés au restaurant de l’hôtel Montalembert dont je connaissais la directrice. Durant le dîner, il me proposa de vivre le rêve de tout artiste. Travailler à ma plus belle œuvre sans aucune contrainte ni financière, ni commerciale. Comment refuser? Il n’était pas question de tout réinventer et de risquer la chute sur un sujet complètement différent de ce que je faisais d’habitude, mais d’intégrer ce nouveau projet à mon œuvre.
Je pris Albrecht au mot en réalisant une œuvre qui réunirait tous les modèles ayant posé pour moi depuis 2003 pour mettre en valeur celle grâce à qui tout est arrivé, la figure centrale de cette apothéose, ma muse qui m’a inspiré jusqu’à aujourd’hui. J’ai commencé à la peindre quand je créais des pin-ups. À l’époque j’avais besoin de nouveaux modèles pour faire un jeu de cartes illustré de mes pin-ups. Une amie très chère me présenta cette demoiselle pour qui je sentis rapidement que le genre pin-up échouerait à rendre justice à sa bouleversante beauté. C’est ainsi que je devins peintre en 2003 avec le portrait intitulé Adieu.
Dès lors, je m’appliquais à travailler sans aucun compromis. J’en faisais tellement lorsque j’étais illustrateur. Désormais je ne peindrai que ce que je voulais pour rester fidèle à mon inspiration. Je crois profondément qu’une œuvre est un être vivant qui se sert de l’artiste pour exister. Je me dois donc d’être à la hauteur, de m’efforcer de progresser et en même temps de la faire grandir et évoluer. Pour ça j’applique un conseil que m’avait donné mon vieux professeur à l’école Duperré, Monsieur Georges Pichard. «Travaillez comme si vous aviez l’éternité devant vous», que j’ai depuis complété par le conseil que je donnerais à mes élèves aspirant peintres, «travaillez comme si c’était le dernier tableau de votre vie». Jamais je n’ai été autant fidèle à ces deux règles que durant l’exécution d’Apothéose.
Le tableau m’a pris trois ans de ma vie. Trois ans de travail, de doutes, dans le froid et la chaleur de mon nouvel atelier à «La Fabrique» à Ivry sur Seine. Il aura fallu beaucoup de patience et de confiance à Albrecht Von Stetten, David Wilson et Kiki Kim, le triumvirat de la Ibex Collection, pour me laisser mener à terme cette extraordinaire aventure que j’ai vécue enfermé! Je dois avouer que mes doutes étaient surtout alimentés par les bribes d’images que je pouvais apercevoir des autres artistes embarqués dans le projet. Leur niveau me semblait tellement au-dessus du mien que je ne pouvais m’empêcher de me sentir comme un imposteur. Mais je retournais à mon ouvrage et trouvais la force de continuer grâce aux victoires que je remportais à chaque fois que je réussissais un visage sur ma toile. J’ai passé trois ans enfermé avec ces belles, j’étais sensé être l’homme le plus heureux de la terre mais ce n’était pas vraiment le paradis.
Parfois un ami venait me rendre visite pour constater l’avancement du travail. J’avais besoin de son regard pour me rassurer. Après, on allait souvent manger un couscous à la brasserie du métro Pierre et Marie Curie. Parfois aussi c’était un modèle qui venait voir comment je m’en sortais. Je crois qu’elles avaient compris qu’elles participaient à un projet extraordinaire qui nous dépassait tous, moi le premier.
Le destin de ce tableau est d’être montré dans une exposition, mais on n’a plus le temps d’attendre. Cela fait déjà deux ans qu’il est terminé. Il est donc temps qu’il affronte votre regard en espérant qu’il vous plaise et qu’il vous rende un peu heureux. Et un jour futur, j’espère que vous aurez l’occasion de le voir en vrai dans sa monumentalité. J’espère qu’à ce moment-là, vous ressentirez tout l’amour et toute l’âme que j’y aurai mis pour je l’espère de très nombreuses années.
Hubert de Lartigue
Vitry sur Seine le 6 septembre 2020
In 2014, Albrecht von Stetten asked to meet in person with the offer to let me do my "Masterpiece". We met at the restaurant of the Hotel Montalembert, the manager of which I knew. During dinner, he suggested that I live every artist's dream. To work on my best work without any constraints, neither financial nor commercial. How could one refuse? The point wasn’t to reinvent everything and risk failing on a subject completely different from what I was used to, but to integrate this new project into my creative work.
I took Albrecht bait by creating a piece that would bring together all the models who had posed for me since 2003, this in order to highlight the one thanks to whom everything has happened, the central figure of this apotheosis, my muse who inspires me to this day. I started painting her when I was doing pin-ups. At the time I needed new models to put together a card game illustrated with my pin-ups. A very dear friend introduced me to this young lady and I quickly felt that the pin-up type would fail to do justice to her overwhelming beauty. This is how I became a painter in 2003 with the portrait titled Adieu.
From then on, I applied myself to working without any compromise, a chore my first job as an illustrator had often required. Starting now, I would only paint what I wanted to stay true to my inspiration. I deeply believe that a work is a living being that uses the artist to exist. So I have to be up to the task, to strive to progress and at the same time to help it grow and evolve. To that end, I heed a piece of advice given to me by my old teacher at Duperré school, Mr. Georges Pichard. "Work as if you had all eternity in front of you", which I have since supplemented with the advice I would give to my aspiring painters students, "Work as if this was the last painting of your life." Never have I been so true to these two rules as during Apotheosis’ creation.
The painting took up three years of my life. Three years of work, of doubts, in the cold and heat of my new workshop at "La Fabrique" in Ivry sur Seine. It took a lot of patience and trust from Albrecht Von Stetten, David Wilson and Kiki Kim, the triumvirate of the Ibex Collection, to allow me to complete this extraordinary adventure that I lived through in lock up! I must admit that my doubts were mostly fueled by the snippets of images I happened upon from the other artists involved in the project. Their level seemed such that I couldn't help but feel like an impostor. Still I went back to my work and found the strength to continue thanks to the victories I won each time I managed to etch a new face on my canvas. I spent three years locked up with these beauties, I was supposed to be the happiest man on earth but it wasn't always so.
Sometimes, a friend would come to visit to check progress on the work. I needed their gaze to reassure me. Afterwards, we often went to eat couscous at the Pierre et Marie Curie metro brasserie. Other times, it was a model who came to see how I was doing. I think they understood that they were part of an extraordinary project that reached beyond us all, first and foremost myself.
The fate of this painting is to be shown in an exhibition, but we no longer have time to waste. It's been ready for two years. So it's time for it to face your gaze, hope you like it, make you a little happy. And one day in the future, I hope you will have the opportunity to see it for real, in its monumentality. I hope that then, you will feel all the love and soul that I have put into it for hopefully many, many years.
Hubert de Lartigue
Vitry sur Seine on September 6, 2020

2 commentaires:

Sham a dit…

Je désespérais de le voir un jour, depuis le temps que je suis votre travail. Et.... WOW.
Ce tableau mérite son nom. Merci pour ce chef d'oeuvre, merci aux mécènes qui ont rendu ce travail possible, merci de partager ça avec le monde. Merci.

Hubert de Lartigue a dit…

Merci pour votre commentaire! je suis heureux que le tableau vous plaise. Heureux aussi de constater qu'il existe encore des visiteurs sur ce blog...